Cleanterview #1 - Michael Le Saulnier, fondateur des Marcheurs Cueilleurs

mardi 27 août 2019
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Depuis 2018, Michael le Saulnier s’implique quotidiennement dans la lutte contre les déchets sauvages dans le cadre des Marcheurs Cueilleurs, association qu’il a co-fondée avec sa femme Virginie, Ismaël Nehlil et Philippe Nizou. Nous sommes allés à sa rencontre pour en savoir plus sur les origines du projet, comprendre les raisons de l’engouement autour des Marcheurs Cueilleurs et connaître les motivations qui le poussent à s’engager de la sorte.


Les Marcheurs Cueilleurs, ça a commencé comment ?

On a créé ça en septembre 2018. L’idée est née le jour de la démission de Nicolas Hulot, on était assis avec ma femme, et on s’est interrogé, car on croyait qu’il arriverait à faire bouger les lignes donc on a été déçu et on s’est reposé cette question qu’on se posait depuis longtemps : qu’est-ce qu’on pourrait faire autour de nous au quotidien, sans moyen, juste avec envie et motivation pour faire bouger les lignes ? 
L’idée a germé. Le hasard (je ne crois pas au hasard moi, je dirais plutôt le destin) a fait que 3 jours plus tard, une petite dame de mon village est venue me voir en me disant  «  Voilà je fais du nettoyage depuis très longtemps de mon côté, j’avais un collectif qui s’appelait les Marcheurs Cueilleurs dans le sud de la France il y a quelques années de cela. On faisait ça tous ensemble. Je vais faire un petit nettoyage pour le World Clean Up Day à Bullion, j’ai contacté la mairie mais je n’ai pas eu de retour. Comme je vous vois souvent autour des associations (sport notamment), cela vous tenterait de lancer tout cela  ?  » . Je ne l’avais jamais vu mais elle me connaissait visiblement. Alors je dis bingo ! On a fait une petite opération à Bullion pour le World Clean Up Day, une petite quinzaine de personnes, on a ramassé quelques sacs. Puis ce qui nous a amené à poursuivre c’est que les enfants à la fin de la journée étaient fiers de ce qu’ils avaient fait et deux d’entre eux nous disaient : pourquoi on ne fait ça qu’une fois dans l’année  ? Donc on s’est dit pourquoi pas le faire régulièrement.  



On s’est alors dit qu’on allait le faire une fois par mois, on en a fait une en octobre aux Essarts-le-Roi, puis une en novembre à Rambouillet. Et en fait très vite beaucoup de gens nous ont rejoint, et on s’est rendu compte que dans les environs beaucoup de gens le faisaient tout seuls. Et donc à Rambouillet, le 18 novembre, on s’est retrouvé déjà à 100 personnes, et c’est à partir de là que tout est né, avec un lancement officiel le 9 décembre. On a aussi eu la chance d’avoir en parrain Yann-Arthus Bertrand qu’on est allé voir un mois à peine avant le lancement officiel.  

Quels sont les champs d’action des Marcheurs Cueilleurs  ? 
 
Le projet se décline en 3 axes. D’abord, des ramassages familiaux de déchets, avec le plus de monde possible, très souvent le dimanche. Il faut que cela soit fait dans la bonne humeur, quelque chose de convivial, avec beaucoup d’humour. Ensuite, on fait également de la sensibilisation des plus jeunes auprès des écoles et centres de loisirs. J’ai eu notamment un rendez-vous avec un directeur d’un centre d’autistes il n’y a pas très longtemps, pour pouvoir faire une opération avec les enfants. La troisième partie c’est de se poser en lanceur d’alerte : dès qu’on voit quelque chose qui ne va pas (scandale écologique, etc.), on est capable d’être lanceur d’alerte, d’avertir les médias, on a déjà eu 3-4 cas de figure majeurs, qui ont tous été réglés maintenant (notamment le cas des décharges sauvages dans les villes de Bennes et Saint Rémy l’Honoré). 



Et quels sont les principaux projets pour les mois à venir  ? 
 
D’abord, on souhaite créer un grand nombre de sections départementales en France (32 à date). On doit également se structurer et se professionnaliser, car on est passé de petite association locale à association assez importante (345 adhérents, 13 000 followers). On cherche à signer un grand nombre de conventions avec les mairies pour agir au niveau des écoles et on travaille sur des projets comme le passeport du civisme. On va également ouvrir une section pêche à l’aimant, avec l’expert dans ce domaine ChrisDetek. Enfin, on s’est découvert une nouvelle passion pour les mégots : on va faire des actions spécifiques mégots, car c’est un vrai fléau (à la fois pour la santé et pour l’environnement). La première opération de ce type réalisée à Rambouillet a cartonné (40 000 mégots collectés), et une prochaine opération aura lieu mi-septembre aux Essarts-le-Roi. 

Avec tout ce que vous faites, est-ce que tu vois les choses bouger autour de toi ? Tu es plutôt optimiste ou pessimiste pour l’avenir  ? 
 
Je m’aperçois qu’il y a énormément d’actions de ramassage un peu partout qui se développent, ce serait bien derrière que les gens jettent moins mais ça viendra. Je trouve que les gens prennent peu à peu conscience qu’il faut changer ses habitudes. Nous dans l’association on est toujours dans le positivisme donc on y croit. En tous cas sur ce domaine-là (celui des déchets sauvages). Et rien qu’avec votre plateforme on se rend compte aussi du nombre d’actions qui se multiplient, ça fait plaisir de voir ça. 



Qu’est-ce que tu dis aux gens pour les convaincre de rejoindre votre mouvement et de ramasser les déchets ?  
 
Pas grand-chose en fait, les gens viennent beaucoup d’eux-mêmes, on a la chance maintenant d’être relativement connu donc les gens nous arrêtent souvent (grâce à nos gilets), nous félicitent. On a beaucoup communiqué sur Facebook, mais on n’a jamais été agressif sur les adhésions ou autre. Il y a beaucoup de bouche à oreille. On reste toujours positif, on n’est jamais négatif, pas moralisateur ni extrémiste. On varie les activités (visite de ferme après ramassage, visite de musée, …). Tout ce qu’on peut faire maintenant qui soit plus ou moins lié on le fait pour apporter de la diversité. Mais je pense que c’est avant tout l’état d’esprit hyper convivial et positif qui a attiré les gens. On essaye de dire aux gens qui le font déjà tout seul de venir nous rejoindre pour retrouver de la joie, de la bonne humeur, de la convivialité et de la solidarité. On veut faire des Marcheurs Cueilleurs une grande et belle famille 

 

Quelle est la plus grande réussite des Marcheurs Cueilleurs  ? 
 
Je dirais d’avoir réussi à créer un vrai groupe soudé. Notre plus grande réussite est d’avoir à chaque action entre 30 et 50 personnes, avec notamment une grande partie d’actifs, qui en plus de travailler la semaine viennent nous rejoindre le dimanche. On a des militaires, des policiers, des pompiers, … et on a réussi à fédérer des personnes qui ne sont pas écolo à la base.  



A part avec les Marcheurs Cueilleurs, qu’est-ce que tu mets en place dans ton quotidien pour réduire l’empreinte liée aux déchets ? 
 
On essaye de changer les habitudes de la famille : on a acheté les 2 livres de Jérémie Pichon (Famille (presque) zéro déchet, Les Zenfants zéro déchet) et on a essayé de mettre en place quelques trucs chez nous. Tout n’est pas facile (on a du mal avec le dentifrice solide) mais on achète de plus en plus en vrac, on a redécouvert les fermes locales, on achète les fruits et légumes en AMAP. On jette maintenant maximum 1 sac par semaine à 5 personnes. Aujourd’hui je ramasse du coup plus de déchets que j’en jette.  
Ensuite, j’essaye dans mon quotidien avec mon réseau de pousser des gens qui sont sur ces thèmes-là. J’ai fait visiter à Yann-Arthus Bertrand la ferme en permaculture d’un adhérent des Marcheurs Cueilleurs, pour pourquoi pas l’intégrer à la Good Planet Fondation.  
 
Le zéro déchet, c’est répandu au sein des Marcheurs Cueilleurs  ? 
 
Certains étaient déjà convertis mais une grande partie pas du tout, donc ils échangent pas mal de réflexes et d’idées lors des ramassages ou sur nos groupes Facebook.  Ça progresse peu à peu. Rien que pour les goûters d’après ramassage, on fait attention à avoir presque que du fait maison, pas de produits industriels. 
 
Que réponds-tu à ceux qui te disent que ce n’est pas à toi / à nous de ramasser les déchets des autres  ? 
 
Alors eux… il est facile de dire ça mais à ce moment-là on reste tous chez soi. C’est facile de dire «  c’est pas à nous, c’est pas à nous, c’est pas à nous, …  » et «  il faudrait que, il faudrait que, il faudrait que…  » mais ceux qui disent ça sont ceux qui au final ne font jamais rien. 

Pour finir, à ton avis, en quoi la plateforme Cleanwalk.org peut aider les Marcheurs Cueilleurs et contribuer à faire bouger les lignes  ? 
 
Je ne pense pas que ce soit une aide uniquement pour les Marcheurs Cueilleurs, je vois ça comme un outil qui pourrait permettre d’avoir demain un vrai planning de toutes les actions qui ont lieu en France dans les semaines à venir. Là, chaque personne qui a envie d’œuvrer pourra alors agir, ça serait génial. Ça ne sert pas qu’aux associations, ça sert beaucoup aux gens qui ne savent pas qui suivre de connaître des groupes qui œuvrent tout le temps. Vous vous adressez à un public qui recherche quelque chose mais ne l’a pas encore trouvé.

Propos recueillis en août 2019.




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